› Une histoire de 250 millions d’années reconstituée à partir d’un forage à 2000 m

Rédigé le : 11-07-2014 Catégorie : Travaux en cours sur le Bassin Parisien

ForageBure

Une histoire géologique de 250 millions d’année reconstituée à partir d’un forage à 2000 m de profondeur

Un consortium de laboratoires et organismes français (CNRS, Universités, BRGM, IFPEN, IRD et IRSN) a pour la première fois réuni ses compétences pour comprendre et analyser un forage profond réalisé par l’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) jusqu’à 2000 m de profondeur dans la région de Bure, à l’Est du bassin de Paris.

C’est en effet dans cette région que le laboratoire de recherche souterrain de Meuse/Haute-Marne, situé entre 420 et 550 mètres de profondeur dans une couche argileuse de 130 mètres d’épaisseur, a été créé en 1999 pour étudier la faisabilité d’un stockage souterrain de déchets radioactifs en milieu confiné. Ce forage permet d’avoir une vue d’ensemble des processus géologiques de la surface jusqu’à 2000 m de profondeur, dépassant la simple étude de la couche argileuse. Les résultats de l’étude pluridisciplinaire de ce forage profond, supervisée par Pr. Maurice Pagel (GEOPS, Université Paris-Sud), sont présentés dans le numéro du mois de mai 2014 de « Marine and Petroleum Geology » (Volume 53, May 2014).

Ce numéro est le fruit d’un programme de recherche diversifié et novateur sur un sujet ayant un enjeu sociétal majeur puisqu’il concerne l’étude d’une possible zone de stockage des déchets radioactifs français. Ce programme aboutira à une trentaine de publications internationales dont 8 constituent le présent volume et représentent bien la recherche réalisée sur ce forage dans des disciplines très variées ; sédimentologie, hydrogéologie, géochimie isotopique, géothermométrie, paléoclimatologie, pétrophysique, diagenèse, minéralogie et géophysique. De nombreux chercheurs sont intervenus comme le montrent les 56 auteurs des 8 articles.

Ce forage a été une opportunité unique pour les scientifiques car il a permis de caractériser les roches sédimentaires du Basin de Paris en continu, de réaliser des carottes régulièrement espacées et d’en réaliser d’autres choisies en fonction des programmes de recherche. Aucun projet de cette envergure n’avait été réalisé sur le sol français depuis le forage de Balazuc, en Ardèche, dont le volume 13, issue 6 de la Revue Marine and Petroleum Geology lui avait été consacré en 1996. Un programme de recherche intitulé TAPSS 2000 « Transferts Actuels et Passés dans un Système Sédimentaire aquifère-aquitard : un forage de 2000 m dans le Mésozoïque du Bassin de Paris » a été élaboré à partir d’une quarantaine de propositions initiales. Les données obtenues dans chaque projet participent à une fertilisation croisée permettant ainsi de mieux comprendre les différents processus géologiques en jeu dans ce bassin sédimentaire. L’évolution de la production carbonatée au cours du Jurassique, l’évolution cycle du carbone et des paléotempératures à la transition Jurassique moyen/supérieur, la diagenèse des carbonates jurassiques, les isotopes stables des eaux des formations jurassiques, les propriétés acoustiques et une modélisation 3D à partir de la sismique des argiles du Callovo-oxfordien sont détaillés dans ce volume. Les principaux résultats mettent en évidence, par exemple, le rôle primordiale des changements climatiques sur la production carbonatée en domaine marin peu profond, que la circulation d’eau douces au Crétacé est l’origine du colmatage des pores de la roche par cimentation diagénétique de calcite, que les températures dans le forage ont été 25°C plus chaudes qu’actuellement, ou encore que la diffusion verticale, processus très lent, est le principal vecteur de transport d’eau au cours des temps géologiques dans la couche argileuse devant recevoir les colis radioactifs.

En ligne http://www.sciencedirect.com/science/journal/02648172/53/supp/C
Infographie du forage réalisé. © Studio Durey / Andra